Communiqué du FLNC: Cedant arma togae…
« Que les armes le cèdent à la toge ». Ces mots de Cicéron illustrent parfaitement la situation créée par le dernier communiqué du FLNC. Le passage de la confrontation armée au combat politique public paraît, depuis toujours, une chose naturelle. Mais l’inverse peut également advenir : c’est devant les impasses d’un combat public par trop déséquilibré que de jeunes Corses décidèrent, il y a presque quarante ans, de contester par les armes la domination parisienne et les ignominies de ses complices. Ainsi vont les affaires humaines, et l’histoire des peuples. La séquence qui s’ouvre aujourd’hui est certainement l’une des plus importantes de la Corse contemporaine.
Un bref retour sur les quatre décennies que nous venons de vivre : un peuple condamné à disparaître a arraché, par la foi de ses forces les plus vives, le droit à l’existence. Nous l’écrivons sans la moindre hésitation, c’est bien le FLNC qui a permis toutes les avancées enregistrées au profit de la Corse. Les différents statuts particuliers, la réouverture de l’Université, la préservation de notre littoral, sont autant de victoires à mettre à l’actif du mouvement national, et singulièrement de sa composante clandestine. Aussi, lorsque la répression sévissait durement et que d’autres se détournaient opportunément de leurs engagements passés, nous maintenions notre solidarité pleine et entière à l’égard du Front. De notre part, il n’y a jamais eu et il n’y aura jamais d’abjuration. Solidaires du FLNC, nous l’avons été jusqu’à aujourd’hui. Solidaires, nous demeurons en la circonstance.
Des erreurs, il y en a eu, comme dans toute démarche humaine. Le Front le reconnait d’ailleurs de façon explicite dans son communiqué, ajoutant que les enseignements en ont été tirés. Mais cette organisation doit être jugée – comme pourrait l’être un Etat – sur le sens général de son action et non sur tel fait particulier. Successeur direct de l’Etat corse de Paoli, le Front a recueilli les attributs de la nation – alors délaissés par tant de Corses – et, de la patrie, il a assuré la continuité historique. Aujourd’hui, il se propose de remettre ces attributs au mouvement public de libération nationale, en attendant la mise en place d’autorités corses souveraines. Cette confiance honore les militants publics, mais leur confère de lourdes responsabilités.
Par ailleurs, désormais, les politiciens insulaires et parisiens qui ont fait de la clandestinité un prétexte pour couvrir leurs turpitudes, sont face à un problème. Car le Front semble leur dire ce qu’en 1989 Alexandre Arbatov – conseiller diplomatique du Président Gorbatchev – avait lancé aux américains : « Nous allons vous rendre le pire des services : vous priver d’ennemi ! ».